Mme Rice se rend en Libye pour consacrer un rare succès diplomatique

AFP 03.09.08

En effectuant en fin de semaine une visite historique en Libye, la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, veut célébrer avec éclat l'un des rares succès diplomatiques du président George W. Bush avant la fin de son mandat.

La chef de la diplomatie américaine effectuera du 4 au 7 septembre une tournée au Maghreb, qui la conduira successivement en Libye, en Tunisie, en Algérie et au Maroc, a annoncé mardi le porte-parole du département d'Etat, Sean McCormack.

"Mme Rice se réjouit de ce voyage, notamment son étape en Libye", a souligné le porte-parole, sortant de sa réserve habituelle pour souligner le caractère exceptionnel de cette "importante visite historique", la première depuis 55 ans d'un secrétaire d'Etat américain dans ce pays.

Depuis la dernière visite d'un secrétaire d'Etat américain en Libye - John Dulles, chef de la diplomatie de Dwight Eisenhower, avait rencontré l'ancien roi Mohammed Idriss en 1953 -, "l'Homme a marché sur la Lune, l'internet est apparu, le Mur de Berlin est tombé et dix présidents américains se sont succédés", s'est émerveillé M. McCormack.

"C'est aussi un jalon important pour marquer le succès de la politique de lutte contre la prolifération nucléaire de cette administration", a-t-il ajouté. "Ceci, pour les Etats-Unis, est un succès en politique étrangère", a renchéri le secrétaire d'Etat adjoint chargé du Proche-Orient et du Maghreb, David Welch.

"Nous considérons qu'il a été bâti sur le travail de plusieurs administrations, mais plus particulièrement, de façon plus marquée, pendant celle-ci", a ajouté M. Welch au cours d'une conférence de presse.

A Tripoli, Mme Rice a prévu de rencontrer le leader libyen Mouammar Kadhafi, qui fut longtemps l'une des bêtes noires des Etats-Unis dans la région pour son soutien au terrorisme, mais dont Washington veut maintenant faire un exemple, pour montrer à l'Iran et la Corée du Nord les bénéfices qu'ils engrangeraient s'ils renonçaient à leur programme nucléaire.

"La Libye est un exemple qui montre que, si certains pays font un choix différent de celui qu'il font actuellement, ils peuvent avoir des relations différentes avec les Etats-Unis et le reste du monde, et que nous tiendrons nos promesses", a souligné M. McCormack.

Rompues en 1981 en raison du soutien présumé de la Libye au terrorisme, les relations entre Washington et Tripoli n'ont été rétablies qu'en 2004, après l'annonce par M. Kadhafi que son pays renonçait à acquérir des armes de destruction massive.

En 2006, la Libye, qui dispose des plus grosses réserves pétrolières d'Afrique, avait été retirée de la liste américaine des Etats soutenant le terrorisme et les deux pays ont depuis nommé des ambassadeurs, mais les relations n'avaient pas encore été complètement normalisées.

Le dernier obstacle, la persistance d'un contentieux entre les familles des victimes des attentats de Lockerbie et Berlin, d'une part, et le gouvernement libyen d'autre part, a été résolu le 14 août, avec la signature d'un accord de compensation des victimes.

Pendant ses entretiens avec M. Kadhafi, Mme Rice entend bien soulever la question des droits de l'Homme, notamment le cas de l'opposant libyen Fathi al-Jahmi, 66 ans, dont le frère vit en exil à Boston, a indiqué M. Welch. M. al-Jahmi est détenu depuis 2004 pour avoir critiqué le régime de Mouammar Kadhafi, appelé publiquement à la démocratie et rencontré un représentant officiel étranger.

La secrétaire d'Etat entend également parler de lutte contre le terrorisme avec le leader libyen, ainsi que de la situation au Tchad et au Soudan, a ajouté le responsable américain.

Dans un communiqué, l'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch (HRW) a demandé à Mme Rice d'appeler les dirigeants libyens à "libérer les prisonniers politiques, abolir les lois jetant en prison ceux qui critiquent pacifiquement le régime, et mettre fin à la torture".