Afrique: Ouvertures des marchés en 2008 - l'Union européenne a du mal à convaincre

Jeanine Fankam, Cameroon Tribune (Yaoundé), 29 Novembre 2007

Les pays de l'Afrique du Centre et de l'Ouest ne trouvent pas leur compte dans le texte que leur propose l'Union européenne.

La réunion qui a rassemblé à Bruxelles les 8 et 9 novembre derniers les ministres en charge des négociations de l'Accord de partenariat économique du groupe ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) a eu plus d'un mérite. Elle a permis de faire le point sur l'état d'avancement des négociations avec l'Union européenne (UE). Les six régions ACP ont pu s'accorder sur un constat : les conditions ne sont pas réunies pour la signature d'un APE complet et équilibré, intégrant le volet développement des régions ACP respectives. Les ministres de l'Afrique centrale en avaient déjà fait le constat quelques semaines avant.

Le 29 octobre, dans une déclaration à l'issue de leur réunion à Bruxelles, ils reconnaissaient que les deux parties en négociation restaient en désaccord sur plusieurs points. Les ministres d'Afrique centrale avaient alors proposé au partenaire européen de déposer auprès de l'Organisation mondiale du Commerce (OMC), une demande de prorogation de la dérogation en cours, en vue « de préserver à l'ensemble des pays de l'Afrique centrale, le régime de préférences commerciales de l'Accord de Cotonou ».

La précaution ci-dessus évoquée doit être prise, car en cas de non-signature de l'APE (comme cela risque d'être le cas) avant le 31 décembre 2007, dès le 1er janvier 2008, les droits de douane du système de préférences généralisées (SPG) s'appliqueront automatiquement aux pays à revenus intermédiaires. Ce qui ne leur est pas avantageux par rapport aux préférences octroyées par l'Accord de Cotonou. Il existe le SPG +, mais tous les pays ne remplissent pas les conditions d'éligibilité.

L'autre grand mérite de la réunion des 08 et 09 novembre 2007, c'est la rencontre des ministres des pays ACP en charge de l'APE avec Pascal Lamy, le directeur général de l'OMC sur l'articulation de l'offre d'accès au commerce des marchandises pour laquelle la quantification de l'essentiel des échanges divise les parties. Le DG de l'OMC, selon nos sources, a humblement reconnu que les textes de son organisme sont muets sur ce point et a appelé les deux parties à une entente pour convenir elles-mêmes de ce qui sera l'essentiel des échanges.

Sur cette question d'accès au commerce des marchandises, la sous-région propose 60% de libéralisation et 40% d'exclusion. Les ministres des pays ACP pensent que 25 ans devraient être la période minimum de transition compte tenu de l'état de développement encore faible des économies de leurs pays, contre 14 ans proposés par l'Union européenne. Les ministres ont aussi constaté que ce que donne l'UE pour financer l'APE est insuffisant et exigent des fonds additionnels.

Aux négociations formelles et officielles, l'UE, selon certaines sources, s'activerait dans des manoeuvres officieuses visant à fragiliser et à diviser le groupe africain. En effet, constat a été fait qu'elle veut traiter dans un cadre bilatéral avec certains pays. Ce qui est une négation même du principe de l'APE qui privilégie l'approche régionale. Au Gabon, l'UE propose un accord d'étape qui ne concernerait que le volet commercial et excluant l'aspect développement. Ce que les observateurs qualifient de piège. Dans le même ordre d'idées, une délégation de l'UE est aussi annoncée en Côte d'Ivoire.