Fin du mandat de Sambi le 26 mai


La Cour constitutionnelle comorienne a invalidé hier l’article d’une loi du 1e mars, qui prolongeait de 18 mois le mandat du président Sambi.

« La loi du congrès du 1e mars dernier est conforme à la Constitution. Il n’y a personne sur cette terre qui peut le contester ». En prononçant ces propos, il y a quelques jours devant une assemblée de notables, le président Sambi ne se doutait, certainement pas, de la décision rendue ce samedi après midi par la Cour constitutionnelle de son pays.

La haute juridiction saisie pour des recours en inconstitutionnalité de cette dite loi introduits par un élu, un chef de parti politique et une présidente d’une association féminine, a décidé d’invalider son « article 2 » qui avait eu comme conséquence de prolonger de 18 mois le mandat du président Sambi.

Si les recours de deux derniers requérants sont déclarés « irrecevables » par les juges constitutionnels, celle du député Djabir Abdou, un membre de l’opposition originaire de Mohéli, est déclarée « recevable ». Elle était, sans doute, la base sur laquelle les membres de la Cour se sont appuyés pour déclarer « anticonstitutionnel » et annuler l’article 2 de la loi du congrès déterminant la date des élections du président de l’Union et des gouverneurs des îles.

Le député Djabir faisait constater dans sa requête que cette loi avait « prolongé d’une manière irrégulière le mandat du président Sambi réduisant par la même procédé les mandats des gouverneurs des îles » et qu’elle « violait la loi ». Des arguments qui ont, apparemment, convaincu les sept membres de la Cour constitutionnelle. Critiquée pour ses décisions qui vont très souvent dans le sens des vœux du gouvernement en place, cette haute juridiction s’est montrée très courageuse dans sa décision rendue ce samedi.

Période « intérimaire »
Elle a notamment déclaré que le mandat du président Sambi prend fin le 26 mai prochain et qu’à partir de cette date « s’ouvre une période intérimaire qui en l’espèce prendra fin avec l’investiture du nouveau président de l’Union et des gouverneurs des îles élus ». Néanmoins, dans un souci d’assurer le « fonctionnement régulier des institutions » et en l’absence des « dispositions électorales préalables à l’organisation des élections harmonisées afin de permettre au nouveaux élus d’entrer en fonction », la Cour a décidé de maintenir le président Sambi et ses vice-présidents à leurs postes.

Toutefois, ceux-ci, exerceront « dans une démarche consensuelle leur pouvoir notamment par la mise en place d’un gouvernement et l’établissement d’un calendrier électoral consensuel », précise l’arrêt de la Cour. Ainsi, à partir du 26 mai, les pouvoirs du chef de l’Etat comorien Ahmed Abdallah Mohamed Sambi, seront très réduits.

Pendant cette période « intérimaire », le pouvoir ne sera pas constitutionnel mais consensuel comme le réclamaient à cor et à cri certains membres de l’opposition comorienne. « En tout état de cause durant toute cette période, il ne saurait être utilisé les dispositions constitutionnelles et légales relatives à la dissolution de l’assemblée de l’Union, au changement du gouvernement, la composition actuelle de la Cour constitutionnelle et au recours aux mesures exceptionnelles sauf en cas d’interruption du fonctionnement régulier des institutions constitutionnelles », mentionnent clairement les juges constitutionnels dans leur arrêt.

Victoire pour l’opposition
Ce verdict est une victoire pour l’opposition, il jette, en même temps, un froid dans les rangs du pouvoir. « Pour la première fois aux Comores, je viens d’assister à une décision kafkaïenne », a réagi Me Fahami Saïd Ibrahim, un député de la mouvance présidentielle et avocat du gouvernement. « La Cour a bafoué le droit de la défense », a-t-il ajouté, visiblement très en colère.

Pour Me Fahami, la cour avait à se « prononcer uniquement sur l’irrecevabilité ou la recevabilité des requêtes ». « Pas d’observation sur le fond. Mais à ma très grande surprise, la Cour a mépris le principe du contradictoire et a rendu une décision au mépris du droit. Le droit de la défense n’a pas été entendu alors que le droit l’y exige », enchaîne l’avocat.

Son collègue avocat et député Ibrahim Ali Mzimba, qui défendait la requête du député Djabir, ne partage pas cet avis. « Je suis très ému de constater l’audace du juge constitutionnel comorien, un juge qui était soumis aux pressions de toutes natures et qui a osé faire face au droit pour démontrer que rien n’est au-dessus du droit, que personne n’est au-dessus du droit et que seul le droit a une puissance pour faire asseoir la paix, la démocratie et la sécurité », a-t-il déclaré à la presse.

Le député s’est réjoui que cette décision mette fin au régime du président Sambi. Cet arrêt de la Cour constitutionnelle intervient alors que reprennent, à partir de la semaine prochaine, des négociations entre les leaders politiques comoriens censées aboutir à la fixation d’un calendrier harmonisé des élections du président de l’Union et des gouverneurs des îles.